Lorsque l’on pense à la santé psychologique au travail, il ne faut pas négliger l’harmonisation de notre vie professionnelle à notre vie personnelle. C’est ce qui est couramment appelé la conciliation travail-vie personnelle, un incontournable de la santé et sécurité au travail (SST).

Depuis les années 1980, la conception de la conciliation travail-vie personnelle a beaucoup évolué. Ce qui était autrefois une thématique spécifiquement féminine concerne désormais tous les travailleurs, qu’ils soient jeunes ou âgés, hommes ou femmes. L’équilibre entre la vie personnelle et le travail englobe notamment les obligations parentales, mais aussi les loisirs, les études et les soins aux parents vieillissants.

Cet équilibre est bénéfique pour la santé des travailleurs et des entreprises. En effet, dans un contexte de pénurie de main-d’œuvre où les employeurs doivent être compétitifs, offrir de meilleures conditions représente un avantage indéniable pour le recrutement, la rétention et le bien-être général.

Gestes clés pour favoriser la conciliation

Identifier

En raison des éléments de culture de travail associés au domaine des services de santé et services sociaux, les enjeux de conciliation peuvent être difficiles à détecter. Puisque nos activités se concentrent sur l’humain, elles sont souvent imprévisibles. Pour pallier cette caractéristique, beaucoup de milieux ont développé une culture de travail qui non seulement normalise, mais valorise l’implication au-delà des heures de travail prévues. Plusieurs travailleurs sont ainsi portés à compléter leurs tâches en dehors des heures de travail ou à prolonger leurs quarts pour soutenir leurs collègues. Bien que ces pratiques valorisent le travail d’équipe, elles représentent des risques pour les travailleurs lorsqu’elles deviennent la norme plutôt que l’exception.  Ajoutons à cela la réalité du travail en continu (milieux 24/7) avec des enjeux de remplacement, et nous obtenons une accumulation de facteurs de risque.

Ces éléments sont pernicieux et peuvent insidieusement venir mettre en danger l’équilibre nécessaire pour maintenir une bonne qualité de vie, tant personnelle que professionnelle. Il est donc crucial de bien connaître les signes précurseurs pouvant indiquer des enjeux en matière de conciliation.

Voici quelques exemples de signes à reconnaître dans son organisation :

  • Arrivée de nouvelles tâches modifiant la routine de travail
  • Déploiement de nouveaux projets nécessitant une plus grande implication
  • Difficulté à accomplir les tâches attendues durant les heures de travail régulières
  • Habitude de compléter les tâches en dehors des heures de travail
  • Sollicitation par des collègues ou supérieurs en dehors des heures de travail
  • Dégradation des relations interpersonnelles
  • Dégradation de la santé physique et psychologique (stress, fatigue, épuisement)
  • Baisse de la motivation et de l’implication, pouvant conduire à une démobilisation ou un désengagement
  • Baisse de la qualité du service rendu, risque d’erreurs

Lorsqu’on observe l’apparition de ces facteurs de risque ou symptômes, il est important d’entamer une réflexion sur la culture organisationnelle et sur les facteurs en question. Comment nos actions favorisent-elles un déséquilibre entre le travail et la vie personnelle? Il est également important de se demander si des changements dans la vie personnelle des employés peuvent être liés aux nouvelles difficultés de conciliation, nécessitant des ajustements (ex. : naissance d’un enfant, changement dans la situation conjugale, nouveau statut de pair aidant).

Agir

Certaines actions clés permettent la mise en place d’un contexte plus équilibré. Par exemple, des horaires plus flexibles ou aménagés peuvent libérer les travailleurs pour des obligations personnelles. Cependant, cela n’est pas toujours possible dans le milieu de l’hébergement. Il est donc nécessaire de trouver des solutions créatives et de s’adapter à la situation des membres de l’équipe, comme en proposant l’échange de journées de travail. La possibilité d’accumuler et de reprendre du temps est également une action gagnante. Notons également qu’offrir une prévisibilité des horaires et des lieux de travail facilite grandement la planification des obligations de la vie personnelle. Certains milieux vont même jusqu’à rembourser les frais de gardiennage ou les repas lors de temps supplémentaire. D’autres ont la chance d’avoir un service de garde sur les lieux du travail.

Il est primordial d’énoncer clairement les initiatives de conciliation mises en place, que ce soit à travers une politique ou une ligne directrice exhaustive. Certains milieux l’incluent même dans leur politique de mieux-être au travail. L’établissement d’un programme de conciliation soutient le développement d’une culture d’équilibre et de sécurité psychologique.

Les actions mentionnées ci-haut relèvent de la responsabilité de l’employeur. Les travailleurs peuvent également agir pour favoriser un meilleur équilibre. Par exemple, une bonne pratique est d’utiliser les outils technologiques à notre avantage en créant des moments où les notifications professionnelles n’apparaissent pas dans nos appareils personnels (période de déconnexion). Une autre bonne pratique consiste à éviter l’utilisation des réseaux sociaux personnels, comme les groupes Facebook, pour des questions de travail et d’échanges d’horaires. Les travailleurs doivent également être attentifs aux signes de détérioration de leur santé mentale, comme discuté dans la section précédente. Il est également important que les travailleurs soient transparents quant à leurs besoins de soutien ou d’accommodement.

Des outils pour aller plus loin

Pour pousser votre réflexion au sujet de l’équilibre vie personnelle et vie professionnelle, vous trouverez plusieurs outils sur la plateforme Concilivi de même que sur les sites Web du gouvernement du Canada et du gouvernement du Québec.

Le paritarisme, comme dans tous les aspects de la SST, est un facteur de réussite lors de l’implantation de mesures de conciliation. En effet, la mobilisation conjointe des employés et de l’employeur favorise l’identification d’actions adaptées à la réalité des travailleurs, augmentant ainsi l’impact potentiel de ces actions. Les acteurs paritaires peuvent également participer au suivi des initiatives locales. Les gestes clés discutés dans cet article sont les premiers pas pour cultiver une culture d’équilibre. Il est ensuite essentiel de mettre en place un processus d’évaluation et de contrôle des impacts des actions mises en place.

Vanessa Monterrey Dugré, conseillère en SST

Alexis Laliberter-Seyer, conseiller et SST

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